vendredi 23 octobre 2015

Sheila Watt-Cloutier pour la défense des communautés Inuits

Sheila Watt-Cloutier est l'une des plus ardentes défenseure des droits économiques, sociaux et culturels des Inuits d’Arctique.

En tant représentante élue de ce peuple, administratrice et avocate, Watt-Cloutier a contribué de manière significative à une refonte du système éducatif à Nunavik au nord du Québec, afin de répondre plus efficacement aux besoins des communautés Inuits.

Elle a pu influer sur l'adoption de la Convention de Stockolm afin de bannir les polluants organiques persistants qui se sont accumulés de façon importante dans les chaînes alimentaires de l'Arctique.

Grâce à sa défense, elle a changé le discours sur le changement climatique en montrant comment les émissions incontrôlées de gaz à effet de serres violaient les droits collectifs des Inuits.


Le travail sur la réforme du système éducatif à Nunavik, Canada.

Sheila Watt-Cloutier est née en 1953 à Nunavik au nord du Québec. Pendant les 10 premières années de sa vie, elle a été élevée dans la tradition, voyageant dans le pays uniquement avec des traineaux à chiens, avant d'être envoyée ailleurs dans une famille en Nouvelle-Ecosse, dans une zone résidentielle de Manitoba.

En tant qu'administratrice d'éducation, travaillant pour le conseil d'éducation de Kativik, elle entreprit plusieurs initiatives pour améliorer les normes éducatives des étudiants Inuits, et aussi pour résoudre les problèmes d'alcool et de toxicomanie touchant le population étudiante Inuit.

Par la suite, en tant que l'un des principales contributrices au rapport du Groupe de Travail sur l'Education à Nunavik en 1992, Watt-Cloutier et l'équipe de dirigeants Inuits de Nunavik fournissent 101 recommandations pour réformer complètement le système, justifiant que tout système d'éducation efficace doit tenir compte des besoins de la communauté; cela comprend l'autonomie de gouvernement, la préservation culturelle et le développement d'infrastructures régionales et communautaires.

Watt-Cloutier a passé plusieurs années à travailler pour mettre en œuvre les recommandations du rapport, qui reste un point de référence important aujourd'hui.


Réalisations en tant qu'élue représentant la société Makivik et le Conseil Circumpolaire Inuit

De 1995 à 1998, Watt-Cloutier est élue et est secrétaire d'entreprise de la société Makivik, l'organisation des revendications territoriales des Inuits, créée d'après la Convention de la Baie James et du Nord Québecois de 1975.

Watt-Cloutier s'est servie de sa position pour aborder les questions de la jeunesse Inuit, travaillant avec eux pour réaliser ensemble le film "Capturing Spirit": un voyage Inuit qui montre leurs différentes préoccupations qu'ils ont face au changement climatique.

En 1995, Watt-Cloutier est aussi élue Présidente du Conseil Circumpolaire Inuit (ICC) du Canada, et elle sera réélue en 1998. l'ICC représente internationalement les intérêts des Inuits en Russie, en Alaska, Canada et Groenland.

A ce poste, elle sert de porte-parole pour les peuples indigènes de l’Arctique dans les négociations de la Convention de Stockholm pour faire interdire ou limiter la fabrication et l'utilisation des polluants organiques persistants (POPs) comme les biphényles polychlorés et les dichlorodiphényltrichloroéthanes (DDT)
Ces substances polluent la chaîne alimentaire de l'Arctique et s'accumule dans l'organisme des Inuits, dont beaucoup subsistent encore de l'alimentation locale.

Lors des négociations, Watt-Cloutier, a fait cause commune avec les dirigeants autochtones et a fourni des preuves irréfutables établissant les effets dommageables des POPs sur la santé humaine et les mères allaitantes.

A travers ses interventions, elle a mis en avant les préoccupations des Inuits et et les a projetés sur la scène mondiale, s'assurant que le savoir traditionnel inuit soit respecté et accepté comme preuve.

La Convention de Stockholm sur les Pops a été adoptée en 2001 et est entrée en vigueur le 17 Mai 2004.
A présent, 179 pays ont ratifié la convention.


Le lien entre le changement climatique et les violations des droits de l'homme

En 2002, Watt-Cloutier est élue Présidente Internationale de l'ICC, une position qu'elle conserve depuis 2006. Elle présenta le rapport sur l'impact climatique en Arctique (ACIA: Arctic Climate Impac Assessment) avant que le sénateur John McCain, du comité sénatorial sur la science, les transports et les communications, ne fasse obstacle à la tentative de l’administration Bush d'empêcher les états de l'Arctique d'adopter des recommandations politiques pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Parmi les découvertes clés de l'ACIA, figure le fait que la hausse des températures en Arctique sont deux fois plus élevées dans le reste du monde.

Le rapport apporte aussi la preuve de la hausse du niveau des mers et de l'accélération de la température globale à cause de la diminution de la surface de glace réfléchissante et de neige en Arctique. En décembre 2005, d'après les découvertes de l'ACIA qui prévoient que la culture de chasse des Inuits pourrait ne pas survivre à la diminution de la mer de glace ainsi que sur d'autres changements prévus dans les décennies à venir, Watt-Cloutier et 62 chasseurs Inuits et des ainés des communautés de tout le Canada et de l'Alaska déposèrent une requête auprès de la Commission Inter-Américaine des Droits de l'Homme (IACHR), justifiant que les émissions non contrôlées de gaz à effet de serre des Etats-Unis violaient les droits de l'homme et la culture Inuit tel que garantis par la Déclaration américaine de 1948 sur les droits et devoirs de l'homme.

Bien que l'IACHR ne donna pas suite à sa requête, la commission invita Watt-Cloutier à témoigner avec son équipe juridique internationale à leur première audition sur le changement climatique et les droits de l'homme le 1er mars 2007.

La pétition, qui est la première action légale international sur le changement climatique, ouvrit la porte à la reconnaissance des droits collectifs des peuples indigènes et établit fermement le lien entre le changement climatique et les droits de l'homme dans le discours global dominant


 Le Doit d'Avoir Froid

Après avoir quitté l'ICC, Watt-Cloutier continue de militer pour les Inuits à titre indépendant, co-enseignant un cours de niveau universitaire sur la dimension humaine du changement climatique à Bowdon College (Etats-Unis) et Mont Allison University (Canada); elle mène aussi de nombreuses conférences à travers le Canada et les Etats-Unis.

En 2015, elle publie le livre sur Le Droit d'Avoir Froid (The Right to Be Cold: One Woman's Story of Protecting Her Culture, the Arctic and the Whole Planet by Watt-cloutier, Sheila (2015) Hardcover) concernant sa vie et sur les effets du changement climatique sur les communautés Inuits.

Alors qu'elle reste une participante active dans les forums internationaux, donnant 10 discours à la conférence sur le climat à Copenhague en 2009, Watt-Cloutier est retournée en Arctique. Elle cherche à développer le potentiel de leadership des jeunes Inuits, en construisant des programmes qui leur permettrait d'utiliser les anciennes compétences Inuits et leur sagesse qui sera significative dans un monde globalisé.

Elle rejette catégoriquement un futur ou les Inuits travailleraient exclusivement pour de grandes industries d’extraction, soulignant que le découragement d'un peuple ne peut être soulagée par un chèque d'une société minière.

Watt-Cloutier a reçu plusieurs distinctions dont le prix Champion de la Terre du Programme Environnement des Nations Unis en 2004, la médaille du nord du gouverneur général en 2005, officier de l'ordre du Canada en 2006. Deux députés norvégiens l'ont nominé avec l'ancien Vice Président américain Al Gore pour le Prix Nobel en 2007.

En 2015, elle reçoit le prix Right Livelihood, pour "son travail de protection des Inuits de l'Arctique, et notamment leur droit à conserver leurs moyens de subsistance et leur culture, gravement menacés par le changement climatique".


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